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Mesure directe de la section efficace d’absorption à deux photons du xénon et son impact sur les mesures des densités d’oxygène atomique par la méthode TALIF dans les plasmas froids

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La mesure directe de la section efficace d’absorption à deux photons du xénon confirme qu’elle est deux fois plus petite que ce que laissait penser son estimation indirecte et conduit à diviser d’un facteur 2 une grande partie des densités d’oxygène atomique mesurées par la méthode TALIF dans les plasmas froids.

Lorsqu’on utilise la fluorescence qui suit l’absorption cohérente de deux photons (« two-photon absorption laser induced fluorescence » ou TALIF) pour détecter la présence de certaines espèces atomiques dans les plasmas froids voire pour mesurer leur densité, il est commun de calibrer la mesure en effectuant en parallèle, dans la même configuration, la même expérience dans un gaz rare de densité connue présentant un schéma de niveaux analogue. La densité de l’espèce recherchée se déduit alors facilement du rapport mesuré des intensités de fluorescence observées, à condition de connaître le rapport des sections efficaces d’excitation des deux espèces.
Ainsi par exemple, la densité d’oxygène atomique dans les plasmas froids ou dans les flammes peut-elle être déterminée par la mesure de la fluorescence qui suit l’excitation par deux photons de 226 nm du terme 3p3P, en calibrant cette mesure par rapport à la fluorescence qui suit l’excitation à deux photons, par le même laser et à une longueur d’onde très voisine, d’un des niveaux 7p ou 6p’ (c’est-à-dire, pour ce dernier, à cœur excité) du xénon. Cependant, si la section efficace d’excitation à deux photons de l’oxygène est relativement bien connue (à la fois expérimentalement et théoriquement), la section efficace du xénon, elle, n’était connue jusqu’ici que par une mesure peu précise de son rapport à la précédente. En outre des expériences réalisées au LPP avaient déjà suggéré qu’elle était, de cette manière, surestimée « peut-être jusqu’à un facteur 2 » [1].
C’est précisément ce que vient de confirmer l’étude menée par Cyril Drag, Florian Marmuse et Christophe Blondel [2], dans laquelle la mesure de la section efficace d’excitation à deux photons repose non sur la mesure de la fluorescence qui en résulte, mais sur la mesure de l’atténuation du faisceau excitateur lui-même, à la sortie d’une cellule de xénon de 51 cm. On s’affranchit ainsi des inconnues que sont, entre autres, le rapport de branchement de la désexcitation vers la fluorescence détectée et l’efficacité de collection de celle-ci. En revanche, pour remonter du taux d’atténuation observé à la section efficace, il convient de disposer d’une modélisation précise du processus d’absorption tout au long de la cellule, ce que facilite le caractère monomode du laser pulsé utilisé (et l’absence qui s’ensuit de battements entre modes de fréquences différentes). Une nouvelle formule analytique, pour l’évolution de cette absorption en fonction de la longueur, est proposée. La section efficace obtenue, intégrée sur toute la largeur (en pulsation) du profil d’excitation, est de 1,36+0,46-0,34×10-43 et 1,88+0,75-0,54×10-43 m4, pour les niveaux 6p’[3/2]2 et 6p’[1/2]0 respectivement. La valeur supérieure obtenue, de façon contre-intuitive, pour le niveau de moment cinétique le plus faible, 6p’[1/2]0, relativement peu utilisé jusqu’à présent, conduit à en recommander l’utilisation.

Pourquoi la section efficace est-elle plus forte vers J’=0 que vers J’=2 ? L’amplitude d’excitation à deux photons (de 224,3 ou de 222,6 nm, selon qu’on vise le niveau 6p’[3/2]2 ou le niveau 6p’[1/2]0) – photons schématisés par les flèches ondulées – est la somme des amplitudes construites par tous les chemins qui peuvent mener, par deux transitions successives passant transitoirement par un niveau intermédiaire de J=1 (flèches rectilignes), au niveau final. Les deux niveaux finals envisagés étant de même état orbital 6p’, les amplitudes qui y mènent ne diffèrent, principalement, que par des coefficients angulaires. Si les amplitudes venant du premier niveau relais 6s’[1/2]1 apparaissent du même ordre de grandeur (et favoriseraient plutôt le moment cinétique final J’=2), en revanche les amplitudes venant du second relais possible, 5d’[3/2]1, apparaissent très déséquilibrées, le couplage vers 6p’[3/2]2 s’avérant, par pur effet angulaire, très faible. Sous réserve d’inventaire des effets des autres niveaux intermédiaires possibles, non représentés (moins importants individuellement mais en nombre infini ...), c’est donc probablement ce pur caprice d’algèbre de Racah qui explique que la section efficace d’excitation résultante pour 6p’[1/2]0 soit plus forte que celle de 6p’[3/2]2.

  1. Adriana Annušová, Daniil Marinov, Jean-Paul Booth, Nishant Sirse, Mário Lino da Silva, Bruno Lopez & Vasco Guerra, “Kinetics of highly vibrationally excited O2(X) molecules in inductively-coupled oxygen plasmas”, Plasma Sources Sci. Technol. 27 (2018) 045006
  2. Cyril Drag, Florian Marmuse & Christophe Blondel, “Measurement of the two-photon excitation cross-section of the 6p’[3/2]2 and 6p’[1/2]0 levels of Xe I at the wavelengths 224.3 and 222.6 nm”, Plasma Sources Sci. Technol. (2021) https://doi.org/10.1088/1361-6595/abfbeb

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